Echos de campagne:Bayrou, un succés pourquoi faire!
Lundi 30 avril 2007
Un succès pour quoi faire ?
Bayrou : la tentation de l'Aventin
Jusqu'au 6 mai, le candidat centriste pourrait ne pas choisir. Mais après la présidentielle viendront les législatives...
« Ca va très bien ! » : François Bayrou s'est vite remis, dimanche soir, de sa déception de ne pas être présent au second tour de l'élection présidentielle.
Jusqu'au bout, il avait pourtant martelé sa «certitude» de devancer Ségolène Royal. Mais quand les premières estimations sont tombées, il s'est consolé
: avec plus de 18% des voix, il triplait son score de 2002. Le candidat UDF allie, dans un mélange singulier, forfanterie et réalisme. Tout au long de
la campagne, il est apparu comme habité : à l'entendre, l'heure du centre allait sonner ! Mais il n'a jamais été tout à fait dupe de ce discours : «Je
sais bien que rien n'est joué », lâchait-il, parfois, loin des caméras. Alors, ce dimanche soir, il a retenu qu'il y avait «enfin un centre en France».
Avant de dîner avec entrain, aux alentours de minuit, Au Petit Tonneau, un bistrot situé non loin de son siège de campagne. Autour de la table, sa garde
rapprochée : ses amis politiques de toujours, Marielle de Sarnez, Hervé Morin, ou encore Jean Arthuis, et ses nouveaux amis du show-business, Marin Karmitz
ou Vincent Lindon.
Comment transformer l'essai ? Comment toucher aux élections législatives les dividendes de la présidentielle ? La question taraude le candidat UDF. Un
de ses proches résume ainsi le paradoxe Bayrou : «François a fait un très, très bon score. Mais ce score est très, très difficilement exploitable. Ça peut
même se terminer façon cata : avec zéro député UDF à l'Assemblée nationale!» Devenu «l'homme le plus courtisé de France», Bayrou a assuré dimanche soir
«se gondoler» devant les appels du pied lancés en sa direction par Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy. Tout en admettant que sa propre situation était «complexe».
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Ô combien ! Durant la campagne, il a également critiqué le PS et l'UMP, tout en attaquant plus sévérement Nicolas Sarkozy que Ségolène Royal. Dans ces
conditions, le retour à la case départ lui apparaît interdit : en revenir à la bonne vieille alliance avec la droite reviendrait à casser sa nouvelle image
d'homme libre. Problème : la grande majorité des actuels députés UDF (28) ont été élus en 2002 grâce à l'apport de voix UMP. La semaine dernière, Gilles
de Robien, ministre UDF mais partisan du candidat UMP, en était sûr : de nombreux parlementaires UDF allaient lui téléphoner dès dimanche soir pour rallier
Sarkozy. Apparemment, ils n'ont pas été très nombreux : les services de Robien ont diffusé un appel pro-Sarko de parlementaires UDF où on ne relevait pratiquement
que les noms de personnalités déjà ralliées, comme André Santini, ou d'élus de la Somme, département du ministre de l'Education.
Bayrou sait que la voie d'eau peut s'élargir. Il doit prouver à ses amis dans les semaines qui viennent que son ascension peut s'accompagner de l'extension
du domaine de l'UDF. Pendant la campagne, il a assuré à ses troupes qu'une centaine de députés UDF pouvaient être élus en juin. Comment y parvenir ? Si
un accord global avec l'UMP paraît aujourd'hui difficile, peut-il être remplacé par un accord politique avec le PS ?
Bayrou a éprouvé des sentiments mitigés devant l'attitude des dirigeants socialistes à son égard durant la campagne du premier tour. Il a apprécié, bien
sûr, les « ouvertures » de Michel Rocard et de Bernard Kouchner. Des « ouvertures » qu'il a lui-même sollicitées, et qui sont le fruit d'un investissement
ancien en direction de la gauche. Mais il a détesté le procès en sorcellerie que lui ont intenté François Hollande et les principaux dirigeants socialistes
: ils ont dénié sa qualité de «centriste», le traitant comme un des représentants de la «droite sortante». C'est ce qu'il a d'abord retenu dans l'appel
de Rocard à un accord entre socialistes et centristes : «Désormais, on ne pourra plus dire de moi : il est à droite», confiait-il.
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conditions, le retour à la case départ lui apparaît interdit : en revenir à la bonne vieille alliance avec la droite reviendrait à casser sa nouvelle image
d'homme libre. Problème : la grande majorité des actuels députés UDF (28) ont été élus en 2002 grâce à l'apport de voix UMP. La semaine dernière, Gilles
de Robien, ministre UDF mais partisan du candidat UMP, en était sûr : de nombreux parlementaires UDF allaient lui téléphoner dès dimanche soir pour rallier
Sarkozy. Apparemment, ils n'ont pas été très nombreux : les services de Robien ont diffusé un appel pro-Sarko de parlementaires UDF où on ne relevait pratiquement
que les noms de personnalités déjà ralliées, comme André Santini, ou d'élus de la Somme, département du ministre de l'Education.
Bayrou sait que la voie d'eau peut s'élargir. Il doit prouver à ses amis dans les semaines qui viennent que son ascension peut s'accompagner de l'extension
du domaine de l'UDF. Pendant la campagne, il a assuré à ses troupes qu'une centaine de députés UDF pouvaient être élus en juin. Comment y parvenir ? Si
un accord global avec l'UMP paraît aujourd'hui difficile, peut-il être remplacé par un accord politique avec le PS ?
Bayrou a éprouvé des sentiments mitigés devant l'attitude des dirigeants socialistes à son égard durant la campagne du premier tour. Il a apprécié, bien
sûr, les « ouvertures » de Michel Rocard et de Bernard Kouchner. Des « ouvertures » qu'il a lui-même sollicitées, et qui sont le fruit d'un investissement
ancien en direction de la gauche. Mais il a détesté le procès en sorcellerie que lui ont intenté François Hollande et les principaux dirigeants socialistes
: ils ont dénié sa qualité de «centriste», le traitant comme un des représentants de la «droite sortante». C'est ce qu'il a d'abord retenu dans l'appel
de Rocard à un accord entre socialistes et centristes : «Désormais, on ne pourra plus dire de moi : il est à droite», confiait-il.
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Dimanche soir, les amis de Bayrou déploraient le sectarisme persistant des représentants officiels du PS sur les différentes chaînes de télé. Dès lors,
leur conviction était faite : le candidat UDF n'avait rien à gagner à un «bricolage» de dernière minute avec la candidate socialiste. Un député résumait
ainsi l'opinion générale. «Avec le PS, soit on signe un véritable contrat, soit c'est macache bono!» Un véritable contrat, ça veut dire, dans l'esprit
des centristes, un accord de désistement au second tour des législatives, l'introduction d'une forte dose de proportionnelle, la nomination de nombreux
ministres UDF, la reprise de pans entiers du projet de Bayrou... Rien que Ségolène Royal soit en mesure d'imposer au PS, estiment les amis de Bayrou. Un
convive du Petit Tonneau expliquait : «Les choses ne sont pas encore mûres avec les socialistes. Il leur faudra une nouvelle gamelle pour qu'ils en viennent
à nous considérer comme des partenaires possibles. »
Ni droite, ni gauche... François Bayrou a prudemment décidé de ne pas s'exprimer avant mercredi et de lancer une vaste consultation des élus UDF. Sa tentation
est de persévérer dans son être : ne pas prendre parti au second tour entre Sarkozy et Royal, et présenter au premier tour des législatives des candidats
UDF dans toutes les circonscriptions. Le mode de financement public des partis politiques, qui lie subsides et nombre de candidats, l'y encourage. «C'est
ainsi : un accord avec l'UMP ou avec le PS qui limiterait le nombre de nos candidats mettrait en péril nos finances», relève un député UDF.
L'espoir secret de Bayrou est triple. Tout d'abord que l'UDF, ou son nouvel avatar, le parti démocrate dont il devrait rapidement annoncer la création,
fasse aux législatives un score voisin de celui de son score à la présidentielle. Ensuite, que de nombreux candidats centristes soient en mesure de gagner
des triangulaires qui les opposeraient à l'UMP et au PS. Enfin, que nombre de députés sortants UDF soient en mesure d'être dans cette situation. Au-delà,
c'est encore plus conjectural. Certains amis de Bayrou imaginent que l'UMP pourrait se désister dans les circonscriptions où ses candidats seraient devancés
par un centriste... sans qu'un accord soit formellement conclu. D'autres pensent que le PS sera plus flexible aux législatives, et que ses candidats pourraient
se retirer devant des centristes, là où les partisans de Dominique Strauss-Kahn sont forts... De tels désistements à la carte sont-ils sérieusement imaginables
? Un historien de l'UDF remarque : «On a oublié que le parti radical a traversé la IIIe République en tissant ici des accords avec la gauche, là des accords
avec la droite.»
Personnellement, François Bayrou sort renforcé de cette élection présidentielle. Il a acquis une vraie stature. «Désormais, quand il montera à la tribune
de l'Assemblée, il sera écouté», observe un proche. Ce qui vaut pour lui ne vaut pas encore pour sa formation. Quand il montera à la tribune, dans la prochaine
Assemblée, il sera sûrement écouté. Mais par combien de députés centristes ?
leur conviction était faite : le candidat UDF n'avait rien à gagner à un «bricolage» de dernière minute avec la candidate socialiste. Un député résumait
ainsi l'opinion générale. «Avec le PS, soit on signe un véritable contrat, soit c'est macache bono!» Un véritable contrat, ça veut dire, dans l'esprit
des centristes, un accord de désistement au second tour des législatives, l'introduction d'une forte dose de proportionnelle, la nomination de nombreux
ministres UDF, la reprise de pans entiers du projet de Bayrou... Rien que Ségolène Royal soit en mesure d'imposer au PS, estiment les amis de Bayrou. Un
convive du Petit Tonneau expliquait : «Les choses ne sont pas encore mûres avec les socialistes. Il leur faudra une nouvelle gamelle pour qu'ils en viennent
à nous considérer comme des partenaires possibles. »
Ni droite, ni gauche... François Bayrou a prudemment décidé de ne pas s'exprimer avant mercredi et de lancer une vaste consultation des élus UDF. Sa tentation
est de persévérer dans son être : ne pas prendre parti au second tour entre Sarkozy et Royal, et présenter au premier tour des législatives des candidats
UDF dans toutes les circonscriptions. Le mode de financement public des partis politiques, qui lie subsides et nombre de candidats, l'y encourage. «C'est
ainsi : un accord avec l'UMP ou avec le PS qui limiterait le nombre de nos candidats mettrait en péril nos finances», relève un député UDF.
L'espoir secret de Bayrou est triple. Tout d'abord que l'UDF, ou son nouvel avatar, le parti démocrate dont il devrait rapidement annoncer la création,
fasse aux législatives un score voisin de celui de son score à la présidentielle. Ensuite, que de nombreux candidats centristes soient en mesure de gagner
des triangulaires qui les opposeraient à l'UMP et au PS. Enfin, que nombre de députés sortants UDF soient en mesure d'être dans cette situation. Au-delà,
c'est encore plus conjectural. Certains amis de Bayrou imaginent que l'UMP pourrait se désister dans les circonscriptions où ses candidats seraient devancés
par un centriste... sans qu'un accord soit formellement conclu. D'autres pensent que le PS sera plus flexible aux législatives, et que ses candidats pourraient
se retirer devant des centristes, là où les partisans de Dominique Strauss-Kahn sont forts... De tels désistements à la carte sont-ils sérieusement imaginables
? Un historien de l'UDF remarque : «On a oublié que le parti radical a traversé la IIIe République en tissant ici des accords avec la gauche, là des accords
avec la droite.»
Personnellement, François Bayrou sort renforcé de cette élection présidentielle. Il a acquis une vraie stature. «Désormais, quand il montera à la tribune
de l'Assemblée, il sera écouté», observe un proche. Ce qui vaut pour lui ne vaut pas encore pour sa formation. Quand il montera à la tribune, dans la prochaine
Assemblée, il sera sûrement écouté. Mais par combien de députés centristes ?
Hervé Algalarrondo
Le Nouvel Observateur
Le Nouvel Observateur
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