01 mai 2007

Echos de campagne:au QG de l'UDF

Lundi 30 avril 2007
 
Dimanche soir au QG de l'UDF
 

Sarko ? Jamais !
 

 A 20 heures pile, dimanche soir, à Paris, on entend un cri immense rue de l'Université, au quartier général de François Bayrou (UDF). Mais il ne monte
pas de là, de cette foule de plusieurs milliers de militants, sympathisants, élus, tétanisés au contraire dans un impressionnant silence à l'annonce des
résultats. Il monte de l'écran de télévision géant où passent les images d'un autre état-major qui, lui, explose de joie, celui de Nicolas Sarkozy (UMP).
Devant les images, une dame en tailleur-bermuda bleu marine se penche vers sa voisine, en tailleur bermuda beige : « Regarde-moi ces connards. » L'autre
murmure : « Quelles ordures. » Toutes deux se sentent « plutôt de droite », et depuis toujours. Aucune des deux n'avaient voté François Bayrou en 2002.
« On était plutôt Chirac. Bayrou, on ne l'avait même pas remarqué. » Toutes deux ont rejoint son équipe cette année, « parce qu'il représentait davantage
nos valeurs ». Sarkozy ? « Au fil des jours, c'est devenu l'ennemi, capable de tous les coups possibles. » L'une : « Il soudoye les gens. » L'autre : «
Il les menace. »
Déjà, à Bercy l'autre soir, pendant le dernier meeting de François Bayrou, le nom de Nicolas Sarkozy déclenchait dans la salle bien davantage de huées
et de colère que celui de Ségolène Royal. Rue de l'Université, dimanche soir, les réactions des militants parisiens de l'UDF sont encore plus violentes.
Des hurlements éclatent quand, à son tour, le discours de Sarkozy est retransmis sur l'écran. « Il n'est entouré que de truands et de voyous : il faut
le mettre en examen. » Sarkozy parle de sa compassion pour les malades. « Même pour les malades génétiques ? », crie un couple de fonctionnaires. Ils n'iront
pas voter au second tour. « Que les grands partis se débrouillent entre eux. » Devant le buffet, une responsable de l'équipe de campagne explique que «
l'UMP a prouvé une seule chose. On peut avoir la majorité partout pendant cinq ans et ne rien faire du tout. » Un diplomate du parti glisse à Antony, caméraman
américain, qu'il votera « Ségolène Royal contre Sarkozy ». Du coup, Antony : « Je ne comprends plus rien. L'UDF, c'est pourtant traditionnellement à droite,
non ? »
Rien n'est simple, ça va de soi. Au même moment et au même endroit, tout l'appareil UDF ferraille dans une réunion confidentielle, au premier étage du
QG. Là, les humeurs sont moins épidermiques, ou plutôt elles le sont autant mais d'une autre manière : depuis toujours, nombre d'élus UDF ont décroché
leur poste grâce aux voix et aux soutiens de l'UMP. « Aujourd'hui, ça tangue entre ceux qui voudront aller à la soupe avec l'UMP et ceux qui poussent à
un ralliement avec le PS », explique un proche. « D'autres ont carrément pris une troisième voie : aucun accord avec personne. » C'est le cas de Gérard
Vignoble, député du Nord : « Bayrou doit rester lui-même. »
La nuit est déjà bien entamée quand des partisans de Nicolas Sarkozy arrivent devant le QG de François Bayrou, pour distribuer des tracts appelant à se
rallier à leur candidat. Le ton monte. Des insultes volent. Le service d'ordre doit s'interposer pour éviter une bagarre.
 
 Florence Aubenas
Le Nouvel Observateur