02 février 2007

Réflexions:des parlementaires sceptiques sur la mise en oeuvre du droit opposable au logement

Mercredi 31 janvier 2007
 
Des parlementaires sceptiques sur la mise en oeuvre du droit opposable
 
Des sénateurs UMP ont déposé des amendements afin de repousser le calendrier prévu par le gouvernement
 
Un enfant marche sous une banderole, le 12 mars 2000 à Paris, lors d'une manifestation organisée par le Droit au logement (DAL) (photo Morin/AFP).
 
Promesse tenue. Le droit opposable au logement annoncé par Jacques Chirac lors de ses vœux aux Français devrait trouver très rapidement une traduction législative.
Le projet de loi, qui est examiné en première lecture par le Sénat à partir du mardi 30 janvier, ne fait pas débat sur le principe. Et, comme le reconnaissait
récemment un responsable socialiste, « il est difficile de s’opposer à une mesure que nous avions nous-mêmes proposée par voie d’amendement ».
 
C’était le 11 avril dernier, lors du débat sur la loi « engagement national pour le logement ». La ministre déléguée à la cohésion sociale Catherine Vautrin
avait alors jugé la proposition socialiste « prématurée et irréaliste ».
 
Le revirement du gouvernement dans ce domaine est difficilement critiquable. D’autant que le texte reprend à peu de chose près les recommandations faites
en décembre 2005 par le Haut Comité pour le logement des personnes défavorisées. En offrant aux demandeurs de logements sociaux une possibilité de recours
juridique, il transforme une simple obligation de moyens en obligation de résultats.
 
Ce droit à un recours juridictionnel est ouvert aux demandeurs de logements sociaux en deux temps : il pourra s’exercer à partir du 1er décembre 2008 pour
les cinq catégories les plus prioritaires. Puis à compter du 1er décembre 2012 pour les autres personnes éligibles au logement social.
 
Un calendrier qui "ne sera pas tenu"
Pourtant, certains parlementaires ne cachent pas leur scepticisme sur la possibilité d’une mise en œuvre effective de ce droit aux échéances fixées, compte
tenu de la pénurie actuelle de logements sociaux. Y compris au sein de la majorité, divisée sur les modalités de mise en œuvre de ce droit.
 
Outre les délais jugés précipités pour l’examen d’une disposition aussi importante, le rapporteur de la commission économique, Dominique Braye, souligne
que sans un effort préalable de construction, « la reconnaissance d’un droit au logement opposable restera lettre morte ». « Proposer un calendrier dont
tout le monde sait qu’il ne sera pas tenu n’est pas raisonnable, insiste le sénateur UMP des Yvelines. C’est faire naître un espoir qu’on risque une fois
de plus de décevoir. »
 
Mêmes réserves exprimées par un autre sénateur UMP, Pierre Jarlier, rapporteur pour avis de la commission des lois. Les deux parlementaires ont donc déposé
des amendements pour reculer les délais fixés par la loi en distinguant le « droit à l’hébergement » pour les sans-abri du « droit au logement ».
 
Les premiers pourraient introduire un recours en 2008 ou même dès 2007. La reconnaissance du droit au logement opposable serait, elle, fixée au 1er janvier
2012 pour les cinq catégories jugées prioritaires et au 1er janvier 2014 pour les autres demandeurs.
 
« Modifier le calendrier en première lecture reviendrait à donner le signe d’un recul alors que cette loi a soulevé un formidable espoir », regrette de
son côté Bernard Seillier, rapporteur du texte au nom de la commission des affaires sociales. Le sénateur de l’Aveyron défend ce calendrier « volontariste
», même s’il reconnaît qu’il implique de gros efforts à faire, notamment en matière de construction de logements.
 
Il a d’ailleurs déposé plusieurs amendements dans ce sens, notamment l’inscription dans la loi de cohésion sociale de la construction de 51 000 logements
très sociaux supplémentaires, ainsi que des dispositifs d’incitation fiscale et de garanties financières pour mobiliser le parc locatif privé en faveur
des demandeurs de logements sociaux.
line ROUDEN