Nous ne voulons pas priver les Haute Seine de leur Président de Conseil Général!
Vendredi 4 mai 2007
La chronique de François Reynaert
Avec lui, tout est passible
Loin de moi l'idée d'influencer votre choix électoral, mais avez-vous pensé aux conséquences énormes qu'il pourra avoir ? Je ne parle évidemment pas de
ces questions subsidiaires, l'avenir du pays, les réformes à venir, notre politique européenne, la surface du nouvel appartement des Chirac, tout ça. Ailleurs,
dans les médias, on ne traite que de cela, que pourrais-je apporter de plus ? Je parle de la conséquence la plus immédiate de cette élection : la décision
rituelle que certains auront à prendre lundi matin comme après toutes les élections : alors, on se tire ou pas ?
Glissons en effet sur la journée de dimanche, elle devrait être de modèle courant. Avant 20 heures, il ne se passera rien d'autre que la semaine passée,
vous serez invité chez des copains pour une soirée télé parce qu'ils tiennent à rentabiliser l'écran plat de trois mètres de large acheté en juin dernier,
et vous passerez donc votre temps les yeux rivés sur votre vieil écran de portable de 3 millimètres carrés parce que vous attendez les SMS d'un copain
qui connaît un type qui a des relations au conseil régional et qui réussira, comme au premier tour, à vous donner des résultats entièrement faux dès 6
heures du soir. Ensuite, pour mettre de l'ambiance entre deux minipizzas, quelqu'un dira « C'est marrant, cette ambiance, ça rappelle la Coupe du Monde.
» Remarque idiote : la probabilité qu'un des deux candidats foute tout par terre à cinq minutes de la fin du match en donnant un coup de boule à son concurrent
parce que celui-ci a traité sa mère dans une langue bizarre est nulle. Enfin on verra le visage du lauréat et on regrettera l'écran plat parce que, sans
faire d'attaque au physique, il faut le rappeler, le 16/9 n'est pas flatteur même pour une jolie femme, alors pour un type un peu court sur jambes, pensez,
on croirait un Playmobil.
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Après, donc, les partisans du vainqueur feront la fête dans les rues, ce qui sera sans doute amusant pour eux mais guère original, on a vu ça tant de fois.
La gauche a eu 1981 et 1988, la droite 1995 et Bernadette 2002, parce qu'à part elle je ne vois pas qui se réjouissait cette année-là. Sans sectarisme,
je pense pouvoir prévoir que la fête de droite sera moins marrante et ce même si les gens ont la bonne idée de ne pas chanter des chansons de M. Barbelivien.
Elle ne pourra en effet que se finir très vite. Je rappelle à ses électeurs que M. Sarkozy a fait sa campagne sur l'éloge de ceux qui se lèvent tôt. Fêter
son éventuelle victoire en finissant bourré à pas d'heure une veille de semaine de boulot serait de mauvais augure. Sans compter que, par habitude, il
aura collé des flics partout, ce qui peut casser une ambiance, d'autant qu'avec lui on ne sait jamais ce qui est permis ou interdit. Vous connaissez son
célèbre slogan : « Avec moi, tout est passible ». Quoi qu'il en soit, de ce simple point de vue, seule la victoire centriste aurait été amusante : pour
aller au bout du bayrouisme, les gens n'auraient pu aller ni à la Bastille, lieu traditionnel de la gauche, ni aux Champs-Elysées, rendez-vous historique
de la droite, mais se seraient sentis obligés de courir toute la soirée entre les deux pour montrer qu'ils sont ouverts à tous, enfin du sport.
Le lundi, donc, se posera enfin cette question postélectorale traditionnelle depuis la grande peur de la bourgeoisie de 1981, songer à l'exil. Et là, je
vous l'affirme, un camp l'emporte nettement. En cas de victoire de M. Sarkozy, que ferons-nous, nous autres de gauche, pour fuir l'ultralibéralisme qu'il
nous promet ? Nous chercherons les seuls pays au monde qui ne sont pas ravagés par cette maladie, en clair ce sera soit Cuba, soit la Corée du Nord, merci
du cadeau. En revanche, si Mme Royal l'emporte, les mouvements de population seront autrement amusants. La moitié des fuyards demandera l'asile politique
dans ce qui est d'ores et déjà le Coblence du sarkozysme : le chalet de Johnny Hallyday en Suisse. L'autre moitié, par vague patriotisme, refusera de quitter
le pays : Neuilly sera transformé en place forte. Ce sera la cité difficile de l'ère nouvelle. Une loi de la jungle y règnera, trafic de stock-options
dans les caves, tournantes d'héritage au tir au pigeon du bois de Boulogne. On verra affluer des milliardaires par familles entières que l'ex-candidat
UMP sera obligé de refouler par business-class entières en déclarant : « On ne peut pas accueillir toute la richesse du monde. » Et nous autres, un sourire
en coin, savourerons enfin notre douce vengeance.
La gauche a eu 1981 et 1988, la droite 1995 et Bernadette 2002, parce qu'à part elle je ne vois pas qui se réjouissait cette année-là. Sans sectarisme,
je pense pouvoir prévoir que la fête de droite sera moins marrante et ce même si les gens ont la bonne idée de ne pas chanter des chansons de M. Barbelivien.
Elle ne pourra en effet que se finir très vite. Je rappelle à ses électeurs que M. Sarkozy a fait sa campagne sur l'éloge de ceux qui se lèvent tôt. Fêter
son éventuelle victoire en finissant bourré à pas d'heure une veille de semaine de boulot serait de mauvais augure. Sans compter que, par habitude, il
aura collé des flics partout, ce qui peut casser une ambiance, d'autant qu'avec lui on ne sait jamais ce qui est permis ou interdit. Vous connaissez son
célèbre slogan : « Avec moi, tout est passible ». Quoi qu'il en soit, de ce simple point de vue, seule la victoire centriste aurait été amusante : pour
aller au bout du bayrouisme, les gens n'auraient pu aller ni à la Bastille, lieu traditionnel de la gauche, ni aux Champs-Elysées, rendez-vous historique
de la droite, mais se seraient sentis obligés de courir toute la soirée entre les deux pour montrer qu'ils sont ouverts à tous, enfin du sport.
Le lundi, donc, se posera enfin cette question postélectorale traditionnelle depuis la grande peur de la bourgeoisie de 1981, songer à l'exil. Et là, je
vous l'affirme, un camp l'emporte nettement. En cas de victoire de M. Sarkozy, que ferons-nous, nous autres de gauche, pour fuir l'ultralibéralisme qu'il
nous promet ? Nous chercherons les seuls pays au monde qui ne sont pas ravagés par cette maladie, en clair ce sera soit Cuba, soit la Corée du Nord, merci
du cadeau. En revanche, si Mme Royal l'emporte, les mouvements de population seront autrement amusants. La moitié des fuyards demandera l'asile politique
dans ce qui est d'ores et déjà le Coblence du sarkozysme : le chalet de Johnny Hallyday en Suisse. L'autre moitié, par vague patriotisme, refusera de quitter
le pays : Neuilly sera transformé en place forte. Ce sera la cité difficile de l'ère nouvelle. Une loi de la jungle y règnera, trafic de stock-options
dans les caves, tournantes d'héritage au tir au pigeon du bois de Boulogne. On verra affluer des milliardaires par familles entières que l'ex-candidat
UMP sera obligé de refouler par business-class entières en déclarant : « On ne peut pas accueillir toute la richesse du monde. » Et nous autres, un sourire
en coin, savourerons enfin notre douce vengeance.
François Reynaert
Le Nouvel Observateur
Le Nouvel Observateur
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